01.01.2022

Sainte Marie, Mère de Dieu

La figure de Marie, a été entourée de plusieurs vocables, tous inhérents à sa personne, à son rôle dans l’histoire du salut, dans l’histoire de l’humanité parce que, d’abord, elle fut mère. Si on la dit “petite fille d’Israël”, elle qui, à douze ans, se consacra au Seigneur au jour de sa présentation au temple, si l’évangéliste Luc nous la présente comme une « jeune fille vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph » (Lc 1, 27), si le même évangéliste nous apprend son nom : “Marie”, si l’ange qui venait de la part de Dieu lui demandant d’être la mère de son Fils l’interpella en ces termes : « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi » (Lc 1, 28), et que Marie elle-même se déclare comme la “servante” du Seigneur, il faudra attendre la prophétie d’Élisabeth, sa cousine, qui dira en l’accueillant chez elle ces paroles prophétiques : « D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » (Lc 1, 43), pour évoquer la maternité de Marie.


Marie apprend alors qu’effectivement elle est mère, qu’elle a été comblée de la grâce promise par l’Esprit. Cette jeune fille dont l’ange lui avait dit : « Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut » (Lc 1, 31-32a), sera donc la ”Mère de Dieu”. Quel mystère insondable et pourtant réel à la fois, car le mystère de la conception virginale de Marie, aboutit à la naissance humaine de Jésus, le propre Fils de Dieu. Le Verbe de Dieu dont saint Jean a dit : « CE QUI ETAIT depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé et que nos mains ont touché du Verbe de vie, nous vous l’annonçons. » (Jn 1,1).


Oui, on nous annonce le Verbe de vie qui a reçu la vie de sa mère, Marie, la toujours vierge. Et cette mère, nous l’avons appris de la bouche même de Jésus sur la croix, est aussi notre mère. En la saluant comme mère de Jésus, n’oublions donc pas qu’elle est notre mère, la mère de tous ceux qui ne font qu’un seul corps avec le Christ, et qu’on appelle par conséquent, et j’allais dire tout naturellement, Mère de l’Église.


Nous savons combien la figure de la mère est intégrée à toute vie humaine parce que c’est elle qui donne la vie en mettant au monde l’enfant qu’elle a gardé neuf mois en son sein. Bien que détaché de sa mère à la naissance, l’enfant n’en demeure pas moins toujours viscéralement attaché à elle. Cette garde qui lui a permis de se former et de devenir l’être accompli qui a vu le jour, restera toujours attachée à la figure de la mère.


Ainsi, le Seigneur dira dans la bénédiction qu’il enseigne à Moïse pour bénir le peuple, pour nous bénir aujourd’hui aussi : « Que le Seigneur te bénisse et te garde ». Et cette garde elle vient de la mère, elle aura toujours le goût de la conception. Toute bénédiction que nous recevons de la part de Jésus-Dieu, nous vient avec l’intercession de Marie pour nous, comme une manière d’enfantement au bien en constant devenir.


Dans sa maternité Marie déploie tout un langage, elle dit l’indicible, elle parle dans le silence, elle évoque le moment. En un mot elle nous aide à vivre, comme elle l’a fait pour Jésus. Marie n’est donc pas quelqu’un à écouter ou à entendre, mais quelqu’un à voir, à ressentir, à épouser dans son acte de mère. Les bergers de la nuit de Noël en ont fait l’expérience. Après avoir entendu « ce qui leur avait été annoncé », ils partirent jusqu’à l’étable de Bethléem et virent le tableau de la crèche. Cependant ils ne nous rapportent rien en direct ; ce que nous pouvons savoir c’est parce que, nous dit l’Écriture, « tous ceux qui entendirent s’étonnaient de ce que leur racontaient les bergers ». « Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur ». Les bergers n’ont certainement pas entendu Marie, mais ils l’ont vue, ils ont reçu la tendresse de son regard, la douceur de son sourire, la beauté de son visage. Ils ont contemplé la Mère de Dieu.


Ainsi le Seigneur, dans sa bénédiction d’aujourd’hui nous dit encore : « Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage », ce visage qui a pris les traits de la mère. Le visage de Marie va bien au-delà de sa forme et de sa tendre nature, il imprime en nous l’amour que Dieu nous porte à l’aune de l’amour qu’elle offre en l’enfantant, donnant ainsi l’amour de Dieu au monde. C’est pourquoi l’amour de Dieu porte les traits du visage de sa Mère.


Et puis, enfin, cette maternité de Marie va au-delà du seul événement de la mise au monde d’un enfant. En effet, elle porte déjà en elle toute la réalité de ce que sera cet enfant ; souvenons-nous des paroles de l’ange Gabriel : « Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin » (Lc 32b-33). Nous recevons ici la prophétie de la royauté du Christ, celui qui sera le Messie, c’est-à-dire le roi qui apporte le salut, le règne qui ne finit pas. Mais pour y arriver il faut suivre Jésus, celui qu’Isaïe avait annoncé, la nuit de Noël, comme “Prince-de-la-paix”. Donc non seulement on peut voir en Jésus un roi gratifié de l’entier des missions de tout gouvernant qui a le devoir de maintenir la paix dans son royaume, mais plus justement encore on doit comprendre Jésus comme étant lui-même la paix. En effet Dieu son Père lui a donné sa gloire, et l’a envoyé porter au monde la paix ; comme l’annoncent les premières paroles de la nuit de Noël rapportées par les anges : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime » (Lc 2, 14).


Ainsi la bénédiction que le Seigneur nous offre aujourd’hui dans le Livre des Nombres se terminera par ses mots primordiaux pour la vie du monde et de l’Église : « qu’il t’apporte la paix ! ». Sans elle le monde ne pourra jamais être enfanté à l’amour de Dieu en totalité, il sera toujours marqué de faiblesses, de difformités, de non-sens qui l’empêcheront immanquablement de recevoir les grâces de la maternité de Marie, car c’est en elle que le Seigneur, comme dit encore la bénédiction, « nous prend en grâce ».


Protégeons donc au fond de notre âme la présence de Marie ; Marie, dans sa maternité, nous garde en Jésus. Marie par son visage nous montre Jésus. Marie dans son œuvre aux côtés de son Fils, nous apprend la paix.


Ainsi soit-il !

Mgr Jean Scarcella