01.11.2021

La Toussaint

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Aujourd’hui est jour de fête ! Le Christ nous appelle à la sainteté, il nous appelle aujourd’hui à être heureux. Les chrétiens ont le droit d’être heureux et de le montrer ! Ils en ont même le devoir, puisqu’ils doivent annoncer au monde l’Évangile qui, traduit du grec, signifie “Bonne Nouvelle”, nouvelle qui donc va rendre heureux !


La fête de la Toussaint nous provoque à cette conversion : vivre en croyants heureux, et donner le témoignage d’un christianisme qui appelle au bonheur. Il est de plus en plus urgent d’être cohérents entre la Parole que nous annonçons et la vie que nous menons, entre l’amour du Christ pour nous, et ce à quoi nous invitons les autres, entre nos choix de vie et les fruits que nous en espérons. Si vraiment le Christ nous fait vivre, cela ne devrait-il pas se voir ? Si nous l’avons un jour rencontré, connu, choisi, aimé, peut-il nous être difficile d’en parler ? Si son amour nous rend heureux, n’aurons-nous pas le désir de le faire connaître autour de nous ?


Ce sont des questions dont nous ne pouvons pas nous départir, car les saints, les amis de Dieu, n’ont pas fait autre chose ; ils ont, durant leur vie terrestre, essayé d’aller en même temps à la rencontre de Dieu et à la rencontre de leurs frères. Le commandement de l’amour, eh bien ils ont toujours cherché à le mettre en pratique… ils ont essayé d’aimer à la manière de Jésus ; et pour aimer, il faut retrousser les manches, ouvrir l’oreille, savoir jeter un œil, se mettre en route, tendre la main, et en même temps lever les yeux vers le ciel et joindre ses mains pour la prière. Les saints l’ont fait, nous le pouvons aussi.


Mais oui, car finalement, cette vie de saints, nous la menons aussi ! Alors pourquoi cette fête, pourquoi nos chants à la gloire des saints ? Ont-ils vraiment besoin de nos honneurs et de notre culte ? En fait, si nous vénérons la mémoire des saints dans une fête comme celle d’aujourd’hui, c’est parce que c’est pour nous que cela importe, non directement pour eux ; naît alors en nous le désir de nous réjouir dans leur communion, d’être mêlés à leur foule immense, d’être associés à leur joie, dans la communion des saints. Ainsi, frères et sœurs, grâce aux saints, nous chercherons les réalités d’en-haut. « Les saints nous désirent, courons vers ceux qui nous attendent, souhaitons non seulement leur compagnie, mais leur bonheur », disait saint Bernard. En effet, si nous souhaitons dans les saints la présence d’intercesseurs pour nous, nous partageons quelque chose de leur gloire ; ils sont pour nous des modèles et nous conduisent au bonheur, celui dont ils jouissent pleinement auprès du Christ.


Et Jésus nous appelle tous à lui. Chaque matin il s’assied sur le mont des Béatitudes, celui que nous gravissons jour après jour en essayant de mettre en pratique cet enseignement qu’il nous offre, cette charte du bonheur. Parce que le bonheur dont parle Jésus ne tombe pas du ciel comme ça, pendant que nous nous croisons les bras, fermons nos mains ou faisons du sur place. Le bonheur, il est acquis dès maintenant, si l’on est pauvre de cœur, c’est-à-dire désencombré et donc disponible, et si on se montre doux, si on se fait artisans de paix, si on se manifeste miséricordieux, affamés de justice, purs de cœur ; une manière de nous battre car, nous dit Jésus, notre combat connaîtra la victoire.


Jésus sait très bien combien il est exigeant pour nous de vivre les béatitudes, tout autant que pour ses contemporains qui n’étaient pas plus saints que nous ! Jésus ne leur a jamais posé aucune condition, il ne leur a fait aucune morale, il ne leur demandait pas s’ils vivaient les béatitudes… mais toujours, lui le premier, a fait le premier pas du bonheur, allant manger chez les pécheurs, discutant seul avec une femme de Samarie, protégeant une prostituée, délivrant un possédé du démon, écoutant ses propres disciples se demander qui serait le plus grand. Aujourd’hui, pas plus qu’à l’époque, il nous demande si nous vivons les béatitudes, mais il reste constamment attentif à nos besoins, ouvert à nos demandes, exemplaire dans son amour. Pourquoi ? Parce que Dieu nous aime en voulant notre bonheur, et la preuve en est que le Christ est mort pour nous à cause de notre péché, cet anti-bonheur. Si Dieu avait attendu que les hommes soient saints et parfaits pour les aimer et venir à eux, il attendrait toujours. Or, la sainteté, ce n’est pas ça ! Le seul qui est saint, c’est Dieu, avec son Fils bien-aimé en qui il dépose la plénitude de son amour. Voilà pourquoi la sainteté, c’est Dieu qui la donne quand il vient mettre gratuitement son amour au-dedans des hommes par le don de l’Esprit. Et c’est dans la mesure où nous nous laissons toucher par Jésus, que lui et son Père peuvent venir faire leur demeure en nous et nous apporter la clé du bonheur. Alors, mais alors seulement, nous pourrons commencer à vivre, humblement, les béatitudes.


Parce que le bonheur est accordé à tous, il est un chemin de vie, de toute vie : être pauvre pour s’ouvrir à l’autre, se faire doux pour refuser la violence, savoir pleurer pour assumer la souffrance et pouvoir consoler, être affamé de justice pour que l’amour soit vainqueur, connaître la misère de nos cœurs pour recevoir la miséricorde, le pardon du Seigneur, rechercher la pureté pour fuir l’hypocrisie, le mensonge ou la méfiance, travailler à la paix pour faire advenir le Royaume, et enfin accepter la persécution pour devenir de vrais témoins de Jésus mort et ressuscité pour nous.


Le bonheur que Dieu offre à toute l’humanité est donné pour rassembler tous les hommes en lui, la foule immense dont parle l’Apocalypse. Nous sommes tous frères et sœurs, la foule rassemblée par l’Agneau, et c’est en union avec les anges et tous les saints que nous chantons : « Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! ».


Mgr Jean Scarcella